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lyrica-massilia

La baguette et l’archet

27 Février 2024 , Rédigé par Jean-Pierre Bacot Publié dans #Opéra de Marseille

Lawrence Forster - Photo @Christian Dresse

 

L’orchestre philharmonique de Marseille a retrouvé pour un soir ce chef américain qui, pendant dix années de direction éclairée, aura amené ses musiciens à ce très haut niveau dont ils ont encore fait preuve ce 23 septembre, à l’Opéra, dans un programme original.

Tout a commencé avec l’ouverture tragique en ré mineur de Johannes Brahms, œuvre écrite en 1880, où l’ensemble des pupitres a été sollicité et où le chef a fait preuve d’un dynamisme étonnant. L’œuvre est construite, mais donne paradoxalement l’impression concomitante d’une rhapsodie légèrement décousue. Les spécialistes comme Olivier Bellamy, qui signe la présentation du concert,  y voient les traces d’une Allemagne du Nord, dont Brahms imprègne sa partition. Elle fut écrite avant son départ pour Vienne et une tout autre ambiance musicale et, plus largement, culturelle. Pour autant, nous n’aurons nulle crainte à avancer que Brahms fut mieux inspiré dans l’écriture de ses symphonies.

Venait ensuite le magnifique concerto pour violon et orchestre n° 1 en sol mineur de Max Bruch (1868 dans sa version définitive) que le jeune virtuose suédois Daniel Lozakovich a interprété avec l’un de ses deux Stradivarius. Le violoniste possède à la fois une prestance, une force et une délicatesse hors pair. L’œuvre, pourtant très fournie de Bruch est à ce jour totalement méconnue, qu’il s’agisse de musique de chambre où de symphonies. Mais, exception remarquable, ce concerto est considéré à juste titre comme l’un des plus beaux du répertoire pour violon et orchestre. D’un romantisme tardif, mais échevelé, il conjugue des moments de puissance et de douceur, avec une rare richesse mélodique. Le violon alterne les berceuses et les déchainements lyriques. Nous  atteignons les sommets de l’art et le public acclame.

Le soliste s’est tourné plusieurs fois, aux moments où l’orchestre jouait seul, vers ses sœurs et frères violonistes, semblant les couver du regard, avant de reprendre le discours musical. A peine âgé de 23 ans, Daniel Lozakovich a déjà derrière lui la moitié de son existence comme soliste, rôle dans lequel il a déjà parcouru le vaste monde.  Félicitons nous de son passage à Marseille qui atteste de  l’attractivité culturelle de la ville. Né en Suède, Lozakovich est d’origine kirghize et biélorusse par ses parents, qui n’étaient pas musiciens. Mais à sept, ans, il entendit jouer du violon…

En rappel, l’artiste qui fait preuve d’une certaine noblesse gestuelle, nous a offert une variation personnelle subtile des Feuilles mortes, musique célébrissime de Joseph Kosma et une œuvre très difficile, commençant comme du Berg, puis devenant mélodique. Bien que nous ayons mobilisé « nos services de renseignement », nous n’avons pu parvenir à  l’identifier. Aussi serions nous reconnaissant à la lectrice ou au lecteur qui  bénéficierait d’une culture musicale supérieure à la nôtre d’avoir la gentillesse de poster un commentaire pour nous en faire bénéficier.

 

Daniel Lozakovich - Photo @Christian Dresse

Proposée en deuxième partie du concert, la quatrième symphonie de Krzysztof Penderecki, écrite en 1989. Ce compositeur polonais (1933-2000), très prisé des cinéastes, est rarement joué en France et cette symphonie aura été pour beaucoup une découverte. Cela ne fut certainement pas le cas pour notre chef cosmopolite qui a connu le compositeur lorsqu’il dirigeait l’orchestre symphonique national de la radio polonaise à la fin du XXème siècle. Les langages classique et moderne sont ici mélangés, peut-être aux dépens d’une audition confortable. Parti dans sa jeunesse de la musique sérielle, autant dire inaudible, qui régnait à son époque, Penderecki en est ensuite venu à un langage néoclassique, voire néoromantique. La quatrième symphonie relève de la deuxième période. Elle présente un univers  savamment construit de contrastes dans une partition que l’orchestre a su remarquablement  illustrer avec un bel équilibre des cuivres et des bois, en particulier, mais aussi des cordes, les alti nous ayant semblé être particulièrement sollicités.

Le prochain concert s’inscrira dans le cycle de musique de Chambre, le samedi  23 mars à 17h,  au Foyer Reyer de l’opéra, avec un trio formé de Valentin Favre à la clarinette, Magali Demesse à l’alto et Olivier Lechardeur au piano, sous le titre « caméléons ». Nous retrouverons avec plaisir Max Bruch avec un extrait de ses huit pièces opus 83, deux mouvements de sonates de Brahms, un hommage à Robert Schumann de György Kurtàg-hongrois de Roumanie bientôt centenaire- et, du même Schumann, les Märchenerzählungen, op. 132. Il est prudent de réserver, vu le nombre restreint de places dans ce Foyer si attachant.                                                                                     

 

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