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lyrica-massilia

Chanson gitane, la bonne aventure à l’Odéon

4 Mai 2024 , Rédigé par Jean-Marie Cabot Publié dans #Odéon

Photo © Christian Dresse

 

Le programme de l'Odéon pour la prochaine saison était à peine dévoilé que nous nous y rendions assister à Chanson Gitane, une œuvre d’après-guerre de Maurice Yvain. Elle n’est peut-être pas la plus connue du répertoire, elle est cependant l’occasion parfaite pour remercier chaleureusement Maurice Xiberras, le directeur de l'Opéra de Marseille et de l’Odéon, de nous en présenter une saison complète et contribuer ainsi à la préservation de ce formidable patrimoine artistique…

Chanson gitane est une comédie romantique qui raconte les amours tourmentées d’un aristocrate de haute lignée, invétéré célibataire et d’une bohémienne promise elle, à son chef de clan. Il n’est pas dit que Maurice Yvain et ses librettistes (André Mouezy-Eon et Louis Poterat) aient souhaité faire une critique acerbe des mariages endogamiques, ni même utiliser les poncifs attribués aux bohémiens pour en faire autre chose qu’un appui à une intrigue néanmoins, assez prévisible… la bru ne pouvant bien évidemment accéder aux désirs de lignage aristocratique de la comtesse, sa belle-mère, l’amour finira comme dans un conte de fées, par triompher des différences…

Le premier acte nous a laissé un peu sur notre faim, c’était drôle, les voix bien portées, les ballets nombreux et bien rythmés, mais il y manquait quelque chose pour que l’alchimie fonctionna tout à fait. Peut-être un peu de vivacité ou de rythme, peut-être aussi la faute de quelques maladresses qui n’ont pas suffi à compenser un livret, nous l’avons déjà dit, très convenu…. Le deuxième acte en revanche, démarrait tambour battant pour rapidement nous faire oublier cette première impression… La lutte des classes battait son plein, Mitidika quittait l’hypocrisie de ce milieu d'apparence pour retrouver les siens, ce qui nous valait de beaux instants musicaux et dansés (Zarifi et l’air « Jalousie » ou encore le superbe duo Mitidika-Zita, « c’est la danse dans notre pays ») et quelques piques assassines « dans votre monde, la franchise est devenue une catastrophe … ». Les ballets éclataient, faisaient la part belle aux danses circassiennes, la duchesse offrait aux amoureux un de ses palais en Italie, tout était bien pour finir bien… et que vive l’opérette !

 

Jeremy Duffau, Laurence Janot - Photo © Christian Dresse

 

Laurence Janot est Mitidika, elle se déplace avec aisance, déploie ses mouvements avec autant d’élégance que de distinction, surtout, avec tellement de sensibilité. Dans l’opérette, il faut savoir jouer, danser, chanter, bouleverser et faire rire, cela dit tout de son interprétation, de la tendresse et de l’émotion qu’elle sut transmettre au public. Jérémy Duffau (Hubert des Gemmeries), célibataire endurci plus enclin à courir après les lapins qu’après les conquêtes, tombe fou amoureux de Mitidika. Il a le maintien altier de la noblesse qu’il représente, très à l’aise sur scène, il met beaucoup de sensibilité et d’intonation dans sa jolie voix de ténor, sûre et percutante. Julie Morgane est Zita, amie et confidente fidèle de Mitidika, elle est comme toujours, immensément drôle. Un poil mutine et facétieuse quand bohémienne, elle jette un sort, elle danse, chante et régale à chaque apparition. Ève Coquart, récemment nommée à la direction de l’opéra de Clermont, campe la duchesse de Bercy. Elle projette sa voix avec bonheur, distribue sa puissance avec souplesse et son timbre, joliment mélodieux, donne au personnage beaucoup de charme et d’empathie. Amoureuse de l’opérette, souhaitons-lui d’en faire profiter le public auvergnat, souhaitons-lui surtout, beaucoup de réussite. Marc Barrard interprète Zarifi, le chef du clan des bohémiens auquel appartient Mitidika. S’il la considère comme sa future épouse, elle se refuse néanmoins à lui, ce qu’il fera en partie payer à Hubert des Gemmeries, sa cible, dans un inénarrable numéro de tireur au cirque. Le baryton est aussi habile au pistolet que dans les graves qu’il sait rendre ténébreux et sombres à merveille. Éloi Horry est Jasmin, domestique des Gemmeries. Il est vraiment excellent, très drôle, jouant à la perfection le couard, pleutre ou encore le dégonflé, son histoire d’amour avec Flavie Maintier (Jeannette), une soubrette aussi charmante qu’espiègle, ajoute encore un peu de romantisme à la comédie. La distribution est complétée par l’austère et hautaine, mais néanmoins parfaite dans le registre, Comtesse des Gemmeries (Anny Vogel), Nicolas (Philippe Beranger), Philippe (Jean Luc Epitalon), monsieur Loyal (Antoine Bonelli, toujours très applaudi).

La mise en scène est signée Carole Clin, qui a su habilement et avec beaucoup d’ingéniosité, enchaîner les tableaux à travers les rideaux et tentures, pour voyager dans tant de lieux aussi éloignés. Les décors de Loran Martinel dont elle s’est servi pour illustrer les nombreuses scènes l’y ont bien aidé, mais également les nombreux et magnifiques costumes de l’opéra de Marseille.

Les jolies chorégraphies étaient signées Maud Boissière, la direction musicale de l’orchestre de l’odéon était assurée par Didier Benetti, celle du Chœur Phocéen par Rémy Litolff.

Le public se retirait ravi d’une telle prestation, les histoires d’amour, de liberté sont une douce catharsis…

 

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