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lyrica-massilia

Splendeurs baroques sous le soleil marseillais.

19 Mars 2025 , Rédigé par Jean-Marie Cabot Publié dans #Marseille Concerts

 

 

 

 

Marseille Concerts et Mars en Baroque, dont le festival bat son plein actuellement, nous ont conviés à un nouveau festin de roi ce samedi 15. Le roi Soleil enfin revenu, nous nous sommes sentis, par instants, transportés à sa cour par la grâce de ce concert « les goûts réünis » - titre emprunté à François Couperin.

La salle était bondée, et l’on remarquait avec plaisir, la présence de nombreux jeunes et même très jeunes spectateurs. Certes, quelques élèves du Conservatoire s’y trouvaient (  Lucie Horsch et Justin Taylor y donneraient le lendemain une master class), néanmoins, leur venue était franchement réjouissante.

La présentation était assurée, toujours avec autant de malice et d’érudition par Olivier Bellamy, cette fois-ci accompagné de Jean Marc Aymes, claveciniste et cofondateur du festival Mars en Baroque.

Les Goûts Réünis, chef-œuvre du génial claveciniste et organiste François Couperin, offre une synthèse magistrale des styles français et italiens longtemps opposés. En les réunissant, il donna naissance à une musique d’une richesse et expressivité inédite. Le concert de samedi soir nous a entraînés dans un voyage musical extraordinaire, unissant à son tour différentes traditions en hommage à l’idéal baroque, pour mieux émerveiller et émouvoir le public.

Virtuosité et expressivité s’exprimaient merveilleusement dans le programme proposé par deux musiciens exceptionnels, Lucie Horsch et Justin Taylor. La première, flûtiste prodige néerlandaise de 26 ans, révélée il y a plus de 10 ans, est récompensée de nombreuses distinctions internationales. Le second, franco-américain, claveciniste brillant et reconnu, est lui aussi un jeune musicien au palmarès impressionnant.

La première partie du programme comprenait la sonate en Do majeur de Telemann et la sonate Op 90 en mi mineur de Boismortier, dans lesquelles les deux musiciens affirmaient toute leur virtuosité, mais aussi la douceur et l’émotion de ces pièces d’une élégance rare. Équilibre et lyrisme révélaient leur beauté. Vint ensuite un moment d’introspection où chaque musicien s’exprimait seul avec son instrument. Lucie Horsch nous livra une interprétation poétique et particulièrement nuancée de « Syrinx » de Debussy. Une pièce inspirée du mythe de la nymphe transformée en roseau, dont elle fit résonner toute la mélancolie. Avec le « Rappel des oiseaux », Justin Taylor, nous transporta dans l’univers raffiné de Rameau, faisant naître de sa virtuosité les vibrations subtiles et élégantes de son instrument. C’est Couperin, avec le « Quatrième Concert royal » qui clôturait cette première partie. Les deux musiciens exprimaient à merveille l’harmonie qui les unit, magnifiant cette réconciliation des styles italiens et français à la fin du règne du roi Soleil. Une pièce délicate et distinguée, servie par une interprétation brillante.

 

 

La deuxième partie reprenait avec « la Suite en La » de Rameau. Justin Taylor déployait dans cet instant exceptionnel, une virtuosité apaisante et gracieuse. Olivier Bellamy nous avait avertis, cette musique allait nous hanter pendant au moins une semaine… Puis vint le tour de Lucie Horsch faisant chanter son instrument dans la sonate A Flauto solo de Nicola Fiorenza. Sous ses doigts d’une habileté diabolique, cette œuvre flamboyante du répertoire napolitain déployait toute son exubérance et son lyrisme.

Suivait alors The Actor with the Monkey, une œuvre récente de Isang Yun. Autant le dire, ce genre musical, trop dissonant à mes oreilles, peut-être trop moderne, ne me séduit guère. Mais un spectateur me confiait « y trouver la poésie et l’imaginaire que cette œuvre suscitait en lui ». Lucie Horsch nous présentait ce morceau avec une pointe d’humour réjouissante, révélant des sonorités explosives et des textures sonores imaginatives et surprenantes.

On ne pouvait terminer un tel concert sans aborder Bach. Deux œuvres furent à l’honneur : BWV 974,concerto en Ré mineur et BWV 1034, sonate en Mi mineur. Dans la première, transcription pour clavecin du concerto pour Hautbois d’Alessandro Marcello, le cantor de Leipzig enrichit l’Andante (joué ce soir) d’une profondeur harmonique remarquable. Justin Taylor en livra une interprétation d’une douceur et d’une émotion rares pour en rendre l’exceptionnelle beauté. La deuxième, une sonate composée pour flûte traversière, se distingue par sa vivacité saisissante. Sous l’interprétation époustouflante de Lucie Horsch, l’œuvre exprima tout à tour la plainte, la gaieté enjouée, le recueillement dans un rythme virevoltant et une fluidité incroyable. Un incident rare vint interrompre les deux musiciens puisqu’un morceau de la flûte chut, ce qui provoqua quelques sourires et explications amusées de la flûtiste. La reprise éclatante fut alors pleine d’entrain pour clôturer ce voyage musical d’une si grande beauté.

Les musiciens revinrent sous une salve d’applaudissements, ô combien mérités. Justin Taylor nous indiqua qu’il avait dorénavant décidé de ne jouer en bis que des œuvres se rapportant au lieu du concert. C’est donc « Tendresse » et « Rigaudon » de Gaultier de Marseille qu’ils nous interprétèrent dans un instant langoureux et vif, évoquant avec élégance la Provence.

Il est des rencontres qui marquent, celle de ces deux musiciens sous l’égide de Marseille Concerts et du festival Mars en Baroque en fut une assurément.

 

 

 

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