Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
lyrica-massilia

Marseille, nouvelle capitale du piano

8 Mars 2025 , Rédigé par Jean-Pierre Bacot Publié dans #SMAC

Il paraît que le niveau monte. Pas celui de la Méditerranée qui ne nous noiera pas  de si tôt, qu’on se rassure, mais celui des jeunes pianistes français qui, en revanche, ne cesse de grimper. Plusieurs spécialistes nous l’ont confirmé. On ne peut donc que se réjouir que la Société Marseillaise des Amis de Chopin continue son œuvre exigeante autant que bienfaisante en donnant l’occasion à de jeunes artistes d’exprimer leur talent devant un public de connaisseurs.

Nous avons eu le plaisir d’assister, ce jeudi 6 mars au soir, dans la salle de Musicatreize de la rue Grignan, à un nouvel épisode de la série que propose régulièrement  la SMAC, sous la forme désormais canonique du double concert. Demi-salle pour la première partie, pleine jauge pour la seconde, le public était au rendez-vous.

Le concert de 18 h 30 aura mis en valeur Elodie Sigrist, jeune virtuose franco-japonaise (20 ans), avec un programme très éclectique  et une double dimension immédiatement sensible de musique et de musicologie. L’artiste a commencé avec la troisième suite française de Bach, jouée de manière très analytique, sans presque de pédale, laissant le Steinway imiter le clavecin. Puis est venu le préromantisme, avec la sonate n° 24, op.78, dite « à Thérèse » de Beethoven. Suivit le Sturm und Drang, dans la Fantaisiestücke op.12 de Schumann, (In der Nacht, Fabel et Traumes Wirren).

Chopin vint alors s’inviter, avec le quatrième Scherzo, le moins joué, le plus intimiste, avant que Debussy ne prolonge étrangement le romantisme avec Masques. La pianiste nous a offert un discours cohérent, montrant diverses facettes de son talent. Elle a été fort justement acclamée.

 

 

Photo © SMAC

 

A 20h 30, cela fut au tour de Rodolphe Menguy.  Cet artiste déjà confirmé malgré son jeune âge (28 ans), jouait pour la première fois à Marseille, Le pianiste a enregistré en 2023 les rhapsodies hongroises de Bartók, Kodály et  Liszt et avait choisi pour ce concert un programme encore plus exigeant. Le prélude opus 45 et le nocturne op. 62 du grand Fryderyk auront été donnés avec délicatesse, précédant la troisième Sonate en si mineur. Celle-ci est moins connue que la deuxième et sa célèbre marche funèbre. Rodolphe Menguy en a donné une version  très habitée, même si le visage restait de marbre.

La deuxième partie de son concert fut une sorte de miroir entre Liszt et Chopin. Cela débuta avec une Berceuse d’une incroyable complexité, avant que le pianiste ne s’attaque au monument que constitue l’unique et majuscule Sonate en si mineur, de 1852-1853. Cette œuvre impressionnante fut dédiée par Liszt  à Robert Schumann. Camille Saint-Saëns en écrivit en 1914 une version dépliée pour deux pianos, ce que le compositeur, disparu en 1886, n’avait pas eu le temps de réaliser lui même.

Après un tonnerre d’applaudissement et même des cris  de joie venus d’un public d’ordinaire très sage, Rodolphe Menguy nous a gratifié d’un double rappel, un nocturne (Nuages) de Claude Debussy et la première suite gnossienne d’Eric Satie. Ce pianiste sait tout faire. Il reste à espérer qu’il retrouve rapidement le chemin  qui mène aux concerts  marseillais

 

Photo © SMAC

 

 

Ce sont donc des soirées de haute qualité qui nous sont offertes par la SMAC. C’est ainsi que se construit la mémoire, au delà du souvenir patrimonial des musiques romantiques ou autres, et que s’entretient la culture. Devant une telle débauche de talents, on ne peut que regretter la grande discrétion des médias phocéens face au standart de  niveau international qui nous est proposé et qui se confirme concert après concert.

Les prochains rendez-vous pianistiques des Amis de Chopin auront lieu dans la salle de Musicatreize le jeudi 24 avril pour la fête de la musique avec Béatrice Berrut, pianiste et compositrice suisse. Elle nous présentera  sa version de l’adagietto de la Vème symphonie de Mahler. Le  jeudi 5 juin, on entendra le suédois Roland  Pöntinen qui fut membre du jury du premier concours Pierre Barbizet. Le jeudi 3 juillet, ce sera enfin, pour clore la saison, une soirée Beethoven d’anthologie, prévue avec la franco-albanaise Marie Ange Nguci et le quatuor tchèque Talich, pour les quatrième et cinquième concertos pour piano transcrits en version de chambre et le quatrième quatuor.  Marseille, ville-monde est désormais aussi capitale du piano.

 

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :