Le triomphe de la main gauche
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Le festival Musiques interdites a frappé un grand coup avec le concert donné dimanche 13 octobre au bel auditorium du Palais des Congrès du Parc Chanot de Marseille.
Ce fut un hommage à Paul Wittgenstein, pianiste autrichien qui perdit le bras droit pendant la première guerre mondiale, et commanda à plusieurs compositeurs un concerto pour la main gauche. On connaît celui qu’écrivit Maurice Ravel entre 1929 et 1931, mais beaucoup moins les trois qui ont été interprétés pour la première fois à Marseille et, concernant deux d’entre eux, (Bortkiewicz et Korngold) une première audition en France.
Olivier Lechardeur a joué le concerto de Serguei Prokofiev, Vladik Polionov, grand habitué du festival, s’est chargé de celui de Serguei Bortkiewicz et Nicolas Stavy de celui d’Erich Wolfgang Korngold.
A la tête de l’orchestre de l’opéra de Marseille, Lawrence Foster avait repris la baguette et nous a permis de découvrir des œuvres qui possèdent un double intérêt. D’un point de vue musicologique, elles élargissent le répertoire et sur le plan de la mémoire elles s’inscrivent dans le projet de Musiques interdites : rendre justice aux artistes victimes des dictatures.
Ces trois concertos composés commandés et composés dans les années 30 requièrent une extrême technicité doublée d’une extrême expressivité et chacun possède une esthétique profondément originale. Celui de Prokofiev à l’expressionisme exacerbé contient une des plus beaux andantes du répertoire : il faut admirablement servi par Olivier Lechardeur, sa profondeur de jeu et son agilité rythmique. Celui de Bortkiewicz demanda à Vladik Polionov toute la plénitude du lyrisme postromantique slave : on gardera en mémoire son jeu au service d’une création en France. Enfin celui de Korngold, aux accents de la sécession viennoise (Mahler, le premier Schoenberg, voire les collages de Gustav Klimt) confrontée aux syncopes du modern style, fut révélé dans sa plénitude pianistique par Olivier Stavy, en symbiose avec maestro Foster et le toujours excellent Orchestre Philharmonique de Marseille.
NB : un grand merci à Michel Pastore et Luc Avrial pour nous avoir fourni de précieux éléments qui nous manquaient